COVID-19, vaccination et populations spécifiques

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Pour les personnes atteintes de maladies chroniques, les femmes enceintes et les patients immunodéprimés, la pandémie de COVID-19 et la disponibilité de vaccins efficaces ont posé de nombreuses questions.

La bonne nouvelle est que, dans la très grande majorité des cas, les vaccins contre la COVID-19 dont l’utilisation est approuvée au Canada sont à la fois sûrs et efficaces. Cela est particulièrement rassurant pour la longue liste des personnes souffrant de maladies chroniques sous-jacentes qui sont plus susceptibles de tomber gravement malades à la suite d’une infection par le SRAS-COV2.

Maladies chroniques

Les Centres de contrôle des maladies et de prévention (CDC) aux États-Unis ont publié une liste de ces maladies qui comprend :

  • Le cancer (autre que les cancers superficiels de la peau).
  • Maladie rénale chronique
  • Les maladies pulmonaires chroniques
  • La démence
  • Le diabète
  • Les maladies cardiaques
  • Les patients ayant subi une transplantation

Plusieurs organisations médicales canadiennes ont publié des avertissements sur le risque accru de maladie grave lié au COVID-19, spécifiques à leurs populations. Par exemple dans une directive publiée en avril 2020 et toujours d’actualité, la Société canadienne de thoracologie (SCT) a déclaré que l’expérience longitudinale avec la grippe et l’expérience initiale avec la COVID-19 « suggèrent que les patients souffrant de maladies pulmonaires chroniques sont à risque de complications graves de l’infection par le SRAS-CoV2. »

En avril 2021, la SCT a formulé des recommandations sur la vaccination contre la COVID-19 et a noté que pour les personnes souffrant de maladies chroniques, « quel que soit le vaccin COVID-19 qui vous est offert en premier, vous pouvez avoir confiance en sa capacité à vous protéger, à condition de continuer à être prudent jusqu’à ce que les cas positifs, les hospitalisations et les décès soient réduits de manière significative à l’échelle nationale. »

Les vaccins contre la COVID-19 disponibles au Canada ont démontré leur valeur dans un large éventail d’autres populations présentant des conditions préexistantes ou des circonstances particulières. Le seul segment de la population pour lequel les vaccins contre la COVID-19 actuellement approuvés sont contre-indiqués est celui des personnes ayant des antécédents d’anaphylaxie après l’administration antérieure du même vaccin. Les vaccins sont également contre-indiqués pour les personnes présentant une hypersensibilité immédiate ou anaphylactique avérée à l’un des composants du vaccin ou de son emballage.

Cependant, la SCT et d’autres organisations ont également souligné que « Les vaccins ne sont pas une solution miracle, d’autant plus que la pandémie se poursuit. Ils doivent être associés à d’autres mesures de santé publique pour réduire le risque de transmission du virus, notamment le lavage fréquent des mains ou l’utilisation de désinfectants pour les mains à base d’alcool, le port de masques faciaux et le maintien d’une distance physique » conformément aux recommandations locales.

Les personnes enceintes

Lorsque les vaccins contre la COVID-19 sont devenus disponibles, l’une des premières discussions a concerné les personnes enceintes et la question de savoir si elles pouvaient être vaccinées en toute sécurité.La Société des obstétriciens et gynécologues du Canada (SOGC) a publié des directives sur l’utilisation des vaccins COVID-19 chez les femmes enceintes en décembre 2020 et les a réaffirmées en mai 2021. Ces directives stipulent que « tous les vaccins contre la COVID-19 disponibles et approuvés au Canada peuvent être utilisés pendant la grossesse et l’allaitement », et que les personnes enceintes devraient se voir proposer la vaccination à tout moment pendant la grossesse ou l’allaitement s’il n’existe aucune contre-indication.La SOGC ajoute que « la décision de se faire vacciner est fondée sur les valeurs personnelles de la personne, ainsi que sur la compréhension que le risque d’infection et/ou de morbidité lié à la COVID-19 l’emporte sur le risque théorique et non décrit de la vaccination pendant la grossesse ou l’allaitement ». La société a cité des preuves montrant que « par rapport aux femmes non enceintes atteintes de la COVID-19, les femmes enceintes présentent un risque accru d’admission à l’hôpital, de soins critiques et de ventilation invasive par rapport à leurs pairs appariés selon l’âge. »Notant que les femmes enceintes et celles qui allaitent ont été exclues des études de phase II et de phase III disponibles pour les vaccins contre la COVID-19 Pfizer-BioNTech et Moderna, la SOGC a déclaré qu’aucun effet indésirable plus important n’a été observé chez les femmes qui étaient enceintes et qui avaient reçu le vaccin. La directive ajoute que « comme les vaccins à ARNm ne sont pas considérés comme des vaccins à virus vivant, on ne suppose pas qu’ils présentent un risque pour le nourrisson allaité. »De même, les personnes enceintes et allaitantes ont été exclues des essais de phase III d’AstraZeneca, et dans les cas de grossesses imprévues qui ont été signalés, il n’y a eu aucun événement indésirable à ce jour. Les essais précliniques avec le vaccin d’AstraZeneca n’ont pas démontré d’effets indésirables sur la fertilité, la grossesse, les résultats fœtaux ou postnataux.

Patients immunodéprimés

Les patients immunodéprimés sont plus exposés que la population générale à des symptômes plus graves du SRAS-CoV2. Au début de la pandémie, puis avec la disponibilité des vaccins efficaces, on s’est demandé si les thérapies systémiques pouvaient augmenter le risque lié à la COVID-19 et/ou diminuer l’efficacité des vaccins.

La plupart des organisations estiment désormais que le maintien de ces thérapies dans cette population l’emporte sur les risques potentiels.

Comme l’indique sans ambages la Fondation de l’Association canadienne de gastroentérologie dans les conseils qu’elle donne sur son site Web à propos du COVID-19 : « D’abord et avant tout, si vous prenez un médicament qui supprime votre système immunitaire, N’ARRÊTEZ PAS DE PRENDRE VOTRE MÉDICAMENT (ce qu’ils nous soulignent)Nous savons qu’avec tout ce qui se passe, cela peut être votre premier réflexe, mais ce n’est absolument pas une option. L’arrêt d’un traitement sans l’avis direct de votre médecin est dangereux et peut vous mener à l’hôpital, ce qui est le dernier endroit où vous voulez être en ce moment. Veuillez continuer à prendre vos médicaments et à prendre des précautions supplémentaires dans votre vie quotidienne jusqu’à ce que la menace soit passée. »

La déclaration de principe de l’Association canadienne de dermatologie (ACD) sur les patients qui prennent des traitements systémiques, publiée en janvier 2021, stipule que « Tous les patients, quel que soit le traitement en cours, devraient recevoir le vaccin, à moins qu’ils n’aient des réactions allergiques graves documentées à un ou plusieurs composants du vaccin. ». L’association note toutefois que bien qu’une légère atténuation de l’efficacité du vaccin puisse être attendue en raison de l’utilisation de certains médicaments, « ce n’est que lorsque la maximisation de l’efficacité du vaccin est une préoccupation primordiale que l’interruption du traitement systémique doit être envisagée. » En outre, l’ACD déclare « qu’il n’y a pas d’autres préoccupations en matière d’innocuité associées à la vaccination des patients sous traitement systémique. »

En mai, la Société canadienne de rhumatologie (SCR) a publié une déclaration recommandant que tout patient atteint d’une maladie rhumatismale auto-immune, ou immunodéprimé en raison d’un traitement, reçoive l’un des vaccins approuvés au Canada. La SCR a ajouté que « étant donné que les recommandations changent fréquemment, la décision quant au vaccin approprié doit se fonder sur les plus récentes directives de la santé publique. Les patients doivent aussi être informés du fait que le profil d’innocuité du vaccin est inconnu chez ces populations, en plus de l’efficacité inconnue et du risque de réponse moindre au vaccin chez les personnes immunosupprimées. »

Dans sa déclaration de début juillet, le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI) déclare qu’il « recommande de préférence de proposer une série complète de vaccins à ARNm contre la COVID-19 aux personnes appartenant au groupe d’âge autorisé qui sont atteintes d’une maladie auto-immune, » et que le vaccin d’AstraZeneca peut être utilisé si les vaccins à ARNm sont inaccessibles.

À l’appui de cette affirmation, le CCNI note que « les études observationnelles chez les personnes ayant une maladie auto-immune indiquent que la fréquence et la sévérité des ÉI dans cette population sont comparables à celles des personnes qui ne souffrent pas de maladie auto-immune et à ce qui a été reporté dans les essais cliniques. » En ce qui concerne l’impact des traitements immunosuppresseurs, le CCNI indique que des études observationnelles ont montré une diminution ou un retard des réponses immunitaires aux vaccins ARNm ou AstraZeneca, mais que ces données sont difficiles à interpréter en raison du nombre limité de participants et de l’absence d’un corrélat immunologique de la protection contre l’infection par le SRAS-CoV-2.

 

La Société Canadienne de thoracologie et la Société Canadienne d’allergie et d’immunolgie clinique précise que lorsqu’il s’agit de vaccins COVID approuvés « il n’y a aucune preuve indiquant des problèmes d’innocuité ou d’efficacité dans les patients asthmatiques suivant un traitement biologique. » Cependant, ils ajoutent « le vaccin contre la COVID-19 ne soit pas administré le même jour qu’un produit biologique pour l’asthme lorsque possible, et les patients asthmatiques devraient idéalement recevoir un vaccin contre la COVID-19 72 heures avant leur produit biologique habituel, afin de déterminer plus facilement laquelle des injections a pu causer un problème si le patient a une réaction. »
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À propos de l'auteur

Jean Bourbeau est directeur du centre de médecine innovatrice du CUSM, de la clinique MPOC et l’Unité de réadaptation pulmonaire, à l’Institut thoracique de Montréal du CUSM. Ses travaux et recherches, surtout sur la MPOC, la réadaptation pulmonaire, les programmes intégrés de soins avec autoprise en charge chez les patients avec MPOC (www.mieuxvivreavecunempoc.com) ont eu une influence non seulement dans le domaine de la recherche, mais aussi dans la pratique clinique ainsi que dans le domaine public au niveau national et international.

Dr Jean Bourbeau

MD, MSc, FRCPC